Tatoueur NAM – Le silence parle à travers l'encre

Dans un monde où tout le monde cherche à parler plus fort, certains artistes choisissent le silence. Ils s’éloignent du bruit des réseaux sociaux, de la course effrénée à l’attention — pour se concentrer sur ce qui compte vraiment : l’art, la profondeur et l’humanité.

Parmi eux, le tatoueur israélien Noam Shukrun, plus connu sous le nom de NAM.

Dans un monde où les gens montrent plus et cachent moins, j’ai choisi l’inverse — rester dans l’ombre, laisser l’art parler, et me concentrer sur l’évolution.

Aujourd’hui, NAM définit son style comme du « réalisme abstrait noir ». C’est une fusion saisissante d’éléments réalistes avec des compositions abstraites puissantes, des tons noirs profonds et de l’espace négatif.

Mon style vit dans la tension entre émotion et précision. C’est un équilibre entre chaos et structure.

Sa capacité à fusionner réalisme et abstraction ne vient pas seulement d’une maîtrise technique, mais d’un sens inné de la forme, du rythme et du vide. Il ressent le monde avec intensité — et cela donne à ses tatouages une force émotionnelle rare. Il y a une tension unique dans son travail, une dramaturgie visuelle subtile mais parfaitement équilibrée.

Depuis neuf ans, NAM affine son style à travers une recherche constante et une expérience de terrain. Il a travaillé dans plusieurs studios réputés en Israël, comme Jellyfish Tattoo, Inkpoint, Urbanbody TLV, et d’autres. Sa démarche artistique s’est aussi exprimée au-delà du studio, notamment à travers son exposition solo « Anonymous », qui mettait en lumière les racines artistiques de son langage tatoué.

Noam a grandi à Be’er Sheva, dans le sud d’Israël. Le plus jeune de quatre frères, il a très tôt senti qu’il était différent — attiré par l’idée d’exprimer ses pensées par l’image plutôt que par les mots.

Quand j’avais cinq ans, l’institutrice nous a demandé de dessiner un visage. Alors que tout le monde dessinait un petit bonhomme souriant, moi j’ai dessiné un profil d’homme — elle était choquée.

Ses dessins d’enfance, les tatouages temporaires, les jeux vidéo avec des fonctions de design — tout cela a jeté les bases de son avenir. À l’adolescence, Noam créait et vendait des designs de tatouage dans le monde virtuel d’APB Reloaded. À 19 ans, il a compris que ce n’était pas un simple passe-temps — c’était sa vie. Il a commandé sa première machine sur eBay, s’est installé dans la cave de ses parents, et a commencé à s’exercer.

Je pense que l’art véritable ne s’enseigne pas. On peut l’étudier, bien sûr — mais être artiste, c’est quelque chose qui vit en toi… ou pas.

Pendant les séances, NAM parle très peu. Il met son casque, entre dans le processus, et selon ses mots, pénètre dans « la zone ».

Ce n’est rien de personnel — c’est ma manière de donner le meilleur. Mes clients respectent cela.

Il ne construit pas sa carrière sur le marketing tape-à-l'œil, mais sur une atmosphère de confiance, de calme méditatif et de concentration totale. Ici, il n’y a pas de place pour le chaos — seulement la personne, la peau et l’art.

Derrière son calme apparent se cache une grande sensibilité. NAM est passé par un burn-out, une dépression, et a fait une pause de six mois dans le tatouage. Mais cette période est devenue un tournant.

Le silence m’a aidé à me souvenir pourquoi j’avais commencé — et à retomber amoureux du métier. Cette descente mentale m’a permis de revenir plus fort.

NAM ne participe pas aux conventions et ne court pas après les millions d’abonnés. Il évite volontairement les listes d’attente trop longues et limite ses rendez-vous à un mois à l’avance.

J’aime être dans l’instant, libre et flexible pour créer quand l’inspiration arrive.

Pour autant, il a collaboré avec des noms reconnus et a participé au projet Healing Ink — une initiative où des artistes recouvrent les cicatrices de survivants de traumatismes, leur permettant de reprendre possession de leur corps et de leur histoire.

Parmi ses œuvres récentes, NAM met en avant un tatouage réalisé pour son ami et collègue Yoandry Silvera : un portrait de Pablo Picasso.

Tatoueur NAM

Pas de bruit — juste la concentration, ma machine et mon casque.

NAM est un artiste qui ne suit les règles de personne. Il ne court pas après les tendances, ne se crée pas un personnage public et ne se vend pas — il crée. Et c’est là sa force. Il choisit le silence pour entendre ce qui compte vraiment. Il rejette le bruit pour rester fidèle à lui-même. Et dans chaque ligne de son œuvre vivent la profondeur brute, l’équilibre parfait et une vérité personnelle.